L'agilité est une promesse de succès. En effet, l'agilité est censée apporter plus de stabilité dans un monde de plus en plus dynamique et instable. Mais de nombreuses organisations ont du mal à comprendre cette notion floue. Ce n'est pas nécessairement le cas, car l'agilité peut être réduite à des éléments tangibles et aide ainsi à mesurer le statu quo dans votre organisation.
Quiconque veut paraître moderne utilise d'une manière ou d'une autre l'agilité comme mot-clé. Le terme est donc souvent utilisé dans des contextes différents. Pour les uns, il s'agit de concepts et de méthodes très concrets comme Scrum ou Design Thinking. Pour d'autres, il s'agit plutôt d'une attitude fondamentale dans le fonctionnement des organisations. Chez Great Place To Work, nous faisons partie de ces derniers : nous pensons que pour être agiles, les organisations doivent développer un état d'esprit agile. En effet, il faut d'abord adopter la bonne attitude de base (mindset) avant de se pencher sur le métier (skillset) et les outils (toolset). Sinon, la base culturelle fait défaut et les concepts et méthodes introduits avec espoir ne restent rien de plus que de bonnes idées, mais échouent inévitablement.
Mais pourquoi toutes les organisations veulent-elles soudain devenir agiles ? La réponse est simple :
- Le changement permanent est la nouvelle normalité. Le monde est devenu volatil, incertain, complexe et imprévisible ("VUCA" ). Les approches traditionnelles de la gestion, de la direction et du travail quotidien ne fonctionnent plus. Aujourd'hui, la gestion d'entreprise ressemble davantage à une descente en eaux vives qu'à un tour de rame sur un lac calme, comme c'était le cas il y a 20 ans.
- La transformation numérique est devenue le paradigme dominant, qui ne modifie pas seulement la manière dont nous travaillons et communiquons, mais qui bouleverse également des processus et des modèles commerciaux entiers. Et celui qui ne prend pas en compte la transformation numérique se retrouve lui-même sens dessus dessous - comme Nokia l'a douloureusement constaté.
- COVID-19 a montré comment les conditions-cadres peuvent changer de manière inattendue et rapide. Novartis, par exemple, a introduit le home office pour de bon. Les organisations agiles ont été en mesure de s'adapter beaucoup plus rapidement et même de tirer profit de la crise.
L'agilité devient ainsi une capacité des organisations qui est à la fois décisive pour le succès de l'entreprise et qui assure sa survie durable.
Avant l'agilité, la définition des objectifs
Plus un terme est vague, plus il est important de procéder de manière analytique et fondée sur des preuves. Si l'on veut devenir plus agile, il faut avant tout savoir ce que l'organisation en attend. L'agilité n'est pas une fin en soi, mais doit soutenir la stratégie globale et ses objectifs. Les entreprises s'organisent typiquement de manière agile afin de pouvoir réagir plus rapidement aux changements dynamiques du marché. Cela se fait par une répartition claire des tâches et des voies décisionnelles courtes. Cela a pour conséquence que les hiérarchies deviennent de moins en moins importantes et que les équipes basées sur les compétences gagnent en importance. L'agilité accroît ainsi l'efficacité des organisations, favorise leur transparence et crée des plateformes de développement attrayantes pour les collaborateurs. En effet, les collaborateurs ne doivent plus espérer atteindre un certain niveau hiérarchique pour exercer une fonction. Désormais, ils ont besoin - et c'est bien plus décisif - de la compétence correspondante.
Relever le statu quo
Après la définition des objectifs, il est nécessaire de faire un état des lieux, c'est-à-dire une évaluation de la situation actuelle. Chez Great Place To Work, nous travaillons avec notre modèle d'agilité et de transformation numérique. Il montre que la capacité de transformation numérique dépend des données, des clients, de la culture et des processus d'une organisation. Or, nous ne pouvons influencer et développer directement que les deux derniers. Ainsi, la culture et les processus ont chacun quatre champs de conception (voir figure 1). Ces champs de conception se conditionnent et s'influencent mutuellement. Ce n'est qu'en prenant des mesures dans tous les domaines et en s'améliorant que l'on peut tirer pleinement profit de l'agilité.

Afin d'établir un état des lieux, il est recommandé d'interroger les collaborateurs, quel que soit le modèle. Les questions possibles portent sur des sujets tels que
- Est-ce que nous nous améliorons en nous donnant sans cesse un feedback ?
- Nous autorise-t-on à avoir des idées radicales pour être vraiment innovants ?
- Expérimentons-nous de nouvelles façons de décider et d'agir plus rapidement ?
- Acceptons-nous aussi des solutions qui ne sont pas parfaites pour avancer plus vite ?
- Est-ce que nous nous mettons en réseau au sein de l'entreprise afin de profiter des connaissances et des expériences des autres ?
De telles questions concrètes permettent de tirer des conclusions sur l'attitude fondamentale au sein de l'organisation et sur le degré d'agilité. D'après notre expérience, il existe souvent un grand écart entre la perception de la direction et des cadres et l'évaluation des collaborateurs. Nous proposons même une enquête spécifique pour mesurer cet écart. Cette transparence est toutefois une étape importante pour devenir plus agile à l'avenir.
Comparer avec le benchmark
La raison de ce décalage entre les collaborateurs et les cadres ? De manière générale, les organisations ont tendance à oublier d'emmener les collaborateurs avec elles dans le voyage. Dans notre étude sur l'agilité en entreprise ((Change Engine while Flying)), nous avons identifié quatre types d'agilité : Les innovateurs actifs ont une confiance maximale en l'avenir. Les optimistes sont majoritairement confiants dans la capacité de leur organisation à relever les défis avec succès. Les stables craignent le changement et préféreraient conserver le statu quo, tandis que les pessimistes pensent que tout ira mal. La répartition de ces types au sein des organisations est intéressante : Ainsi, seuls 9% des collaborateurs sont des innovateurs actifs et 30% des optimistes, tandis que 52% comptent parmi les stables et 10% parmi les pessimistes. Moins de 10% des collaborateurs sont donc réellement agiles, tandis que plus de 60% sont critiques vis-à-vis de l'agilité.

En route vers un avenir agile
La question est maintenant de savoir comment transformer les personnes stables en optimistes, voire en innovateurs actifs. Pour cela, il faut d'une part une enquête quantitative auprès des collaborateurs, qui fournit une analyse de l'état actuel basée sur des preuves. Ensuite, la position souhaitée, c'est-à-dire l'état futur idéal, est définie dans le cadre d'ateliers par champ d'organisation ((voir illustration X ci-dessus)). On en déduit ensuite les mesures nécessaires pour y parvenir. Ici aussi, l'implication des collaborateurs est décisive : Premièrement, plus ils sont impliqués, plus les mesures sont efficaces. Deuxièmement, cela augmente leur engagement et troisièmement, cela donne déjà l'impulsion initiale à l'agilité, ce qui rend automatiquement l'organisation un peu plus agile.